Le jeûne intermittent est-il un régime anti-Covid ?

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Le jeûne intermittent fait perdre du poids mais semble également réduire l’inflammation. Il jouerait également un rôle dans le déclenchement de la réponse immunitaire (1). Or les formes sévères de Covid-19 sont associées aux problèmes de poids, à un dérèglement du système immunitaire et un état hyper-inflammatoire. Un détour du côté de cette pratique alimentaire nous a donc semblé mérité (1).

Le jeûne intermittent en bref

Afin d’observer d’éventuels effets sur le métabolisme (donc le poids), un individu doit s’alimenter durant une plage de maximum 10h en journée. Le jeûne doit durer 14h minimum entre le dernier et le premier repas. Par exemple, si la personne prend son premier repas à 9h le matin, elle doit consommer son dernier repas avant 19h le soir (2).

Les effets du jeûne intermittent sur le système immunitaire

Des cellules stressées par le jeûne

Au niveau de la cellule, le jeûne intermittent est un « stress » qui déclenche un mécanisme d’adaptation. Pour survivre, la cellule stoppe sa croissance et sa reproduction pour mieux maintenir, recycler et réparer les éléments qui la constitue. La cellule accentue de surcroit l’élimination de ses composés endommagés. Ce mécanisme, appelé « autophagie » pourrait renforcer l’immunité (3).

Une modification du microbiote intestinal

Le jeûne intermittent présente des effets anti-inflammatoires et modifie la flore intestinale (microbiote intestinal). Or, cette flore joue un rôle dans la régulation de l’immunité antivirale. Dans une expérience chez la souris atteinte d’une maladie neurologique comparable à la sclérose en plaque, le jeûne intermittent a amélioré l’évolution de la maladie. Les chercheurs ont constaté par ailleurs une augmentation de la richesse en bactéries intestinales et notamment certaines familles de bactéries. Les microbes intestinaux prélevés à partir des souris ayant effectué le jeûne intermittent ont été transplantés à des souris elles-aussi malades mais ayant suivi un régime alimentaire normal. Résultat : leur état de santé s’est également amélioré. Cela suggère que les effets du jeûne intermittent sont au moins partiellement médiés par la flore intestinale.

Que dit la science sur l’impact réel du jeûne intermittent contre la Covid-19 ?

Prometteur pour la perte de poids mais non validé pour la réduction des autres facteurs de risques de formes graves de Covid-19


L’obésité et les maladies métaboliques comme le diabète augmentent les formes grave de Covid-19. Ainsi en théorie, toute méthode permettant de perdre du poids, d’améliorer le contrôle du diabète ou de l’hypertension artérielle est susceptible d’améliorer le pronostic des personnes à risque de formes sévères de Covid-19.
 
Mais si le jeûne intermittent apparaît comme une méthode prometteuse pour la perte de poids, l’amélioration du métabolisme humain (l’ensemble des réactions chimiques qui se produisent dans l’organisme) n’est pas suffisamment prouvée. En témoigne une récente synthèse des études scientifiques sur le sujet. Des chercheurs ont constaté que, sur trois mois, les personnes qui pratiquent le jeûne intermittent perdent davantage de poids en comparaison à une alimentation habituelle (entre 2 et 3 kg de plus en moyenne). En revanche, le jeûne intermittent ne semble pas améliorer le taux de sucre dans le sang. Et aucune étude de qualité n’a évalué l’impact du jeûne intermittent sur les facteurs de risque cardio-vasculaires (4).

Trop incertain en soutien des fonctions immunitaires lors d’une infection virale

Concernant le soutien des fonctions immunitaires, peu de données sont encore disponibles. Le jeûne intermittent semblerait bénéfique pour améliorer la résistance de l’organisme aux infections bactériennes (1). Mais une expérience autrichienne laisse perplexe. Les chercheurs ont injecté à des souris une molécule qui imite l’effet d’une infection virale. Ils ont ensuite fait jeûner les souris 1 jour sur 2 durant 9 jours. Résultat : les quantités de certaines cytokines pro-inflammatoires ont augmenté (5). Cela ne colle pas avec les bénéfices attendus dans un contexte de forme grave de Covid-19. Il s’agit en effet d’une situation dans laquelle on souhaite plutôt empêcher l’emballement de ces fameuses cytokines. Il n’existe en outre aucune étude décrivant les effets du jeûne contre l’infection par le SARS-CoV-2.

Des risques potentiels pour les personnes vulnérables

De plus, cette pratique n’est pas anodine. Outre les effets secondaires fréquents, (somnolence, difficultés d’endormissement, irritabilité), le jeûne expose les personnes vulnérables (personnes âgées, dénutries, présentant des antécédents cardiaques, de diabète, traitées par médicaments hypoglycémiants etc) à des risques pour leur santé. Le jeûne ne devrait donc pas être entrepris sans l’avis d’un médecin.

En résumé

Les scientifiques ne sont pas unanimes quant aux réels bénéfices du jeûne intermittent sur la fonction immunitaire. Des informations manquent particulièrement pour l’immunité antivirale. Il convient de ne pas prendre de risque en cette période, surtout chez les personnes les plus vulnérables. Privilégier le modèle méditerranéen, sans risque et facile à suivre. Ses bénéfices sont plus étayés et ce dernier semble réunir plusieurs critères décisifs.




1.   Faris MA-IE, Salem ML, Jahrami HA, Madkour MI, BaHammam AS. Ramadan intermittent fasting and immunity: An important topic in the era of COVID-19. Ann Thorac Med. 2020;15(3):125‑33.

2. Limited Evidence for the Health Effects and Safety of Intermittent Fasting Among Patients With Type 2 Diabetes | Lifestyle Behaviors | JAMA | JAMA Network [Internet]. Disponible sur: https://jamanetwork.com/journals/jama/article-abstract/2768095

3.   Hannan MdA, Rahman MdA, Rahman MS, Sohag AAM, Dash R, Hossain KS, et al. Intermittent fasting, a possible priming tool for host defense against SARS-CoV-2 infection: Crosstalk among calorie restriction, autophagy and immune response. Immunol Lett. oct 2020;226:38‑45.

4.   Allaf M, Elghazaly H, Mohamed OG, Fareen MFK, Zaman S, Salmasi A-M, et al. Intermittent fasting for the prevention of cardiovascular disease. Cochrane Database Syst Rev [Internet]. 2021;(1). Disponible sur: https://www.cochranelibrary.com/cdsr/doi/10.1002/14651858.CD013496.pub2/full

5.   Frontiers | Intermittent Fasting Exacerbates the Acute Immune and Behavioral Sickness Response to the Viral Mimic Poly(I:C) in Mice | Neuroscience [Internet]. Disponible sur: https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fnins.2019.00359/full

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