Addiction aux jeux vidéo et à internet : existe-t-il des solutions ?

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Vous arrive-t-il de passer des heures à jouer au dernier jeu à la mode ou de rester scotché à votre smartphone ? Si oui, vous êtes peut-être accro à internet ou aux jeux vidéo. Avec le développement d’internet, des médias sociaux, des jeux ou du commerce en ligne, de nouvelles addictions voient le jour. L’addiction à internet et aux jeux vidéo touche autant les adultes que les enfants. Existe-il des solutions pour mieux gérer ces nouvelles addictions ?

Pourquoi s’interroger sur nos comportements face à notre « consommation » du web ?

Côté jeux vidéo

Chiffres

Bien qu’il soit difficile d’estimer le nombre de personnes ayant des troubles addictifs aux jeux vidéo, la proportion de personnes qui jouent a tendance à augmenter.
Selon une étude en ligne réalisée en 2019 par le SELL (Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs), 71 % des Français se définissent comme joueurs, 49% jouent régulièrement ; 1 enfant sur deux et 1 adulte sur 3 joue tous les jours (1).
Depuis 2019, le trouble du jeu vidéo ou « gaming disorder »
est reconnu par l’Organisation Mondiale de la Santé.

Critères

Le trouble du jeu vidéo se définit par un comportement persistant ou non, caractérisé par :

  • des difficultés à contrôler le comportement de jeu : début, fréquence, intensité, initiation, fin et contexte;
  • la priorité donnée aux activités de jeu, de plus en plus au détriment des autres intérêts et des activités quotidiennes;
  • la poursuite ou augmentation des activités de jeu malgré la survenue de conséquences négatives;
  • ces comportements sont suffisamment sévères pour entrainer une gêne significative des activités personnelles, familiales, sociales, scolaires, professionnelles ou autre…
  • ces troubles peuvent être permanents ou intermittents et durent au moins 12 mois, moins si les 3 types de symptômes sont sévères.

Conséquences

Les jeux vidéo sont associés à de nombreux préjudices pour la santé tels que : dépression, troubles du comportement, hyperactivité, trouble de l’attention, troubles scolaires et même tendances suicidaires chez les enfants.
Il devient essentiel d’observer le comportement de nos enfants aussi bien que les nôtres pour détecter les signes précurseurs d’une potentielle dépendance.

Côté internet

Chiffres

L’addiction à internet est parfois appelée « Dépendance à internet », « Cyberdépendance », « Usage problématique d’internet », « Usage compulsif d’internet », « Usage pathologique d’internet ». Elle est essentiellement une addiction aux réseaux sociaux: la consultation des réseaux sociaux (Facebook, Snapchat, WhatsApp), prend de plus en plus de place dans la vie des personnes (2).

France

La prévalence de l’addiction aux écrans, à l’internet et au smartphone n’est pas encore connue pour la France. Selon l’étude réalisée en 2018, l’utilisation des écrans, réseaux sociaux et jeux vidéo, est spectaculairement élevée chez les jeunes, et plus encore chez les adolescents (2).

Suisse

La première étude réalisée en Europe par une équipe suisse en 2015 chez environ 1 500 étudiants de 18 ans d’âge moyen a abouti à estimer un taux de dépendance à 17% (2).

Espagne/Belgique

Une étude réalisée en Espagne et en Belgique francophone sur une petite population a rapporté les taux respectifs de 12,5% en Espagne et 21,5% en Belgique francophone (2).

Critères

L’addiction à internet se caractérise par :

  • Se sentir nerveux lorsque l’on ne trouve pas son smartphone immédiatement
  • Regarder sans cesse ses mails et réseaux sociaux
  • Passer plus de temps sur les réseaux sociaux que dans les relations en face à face
  • S’informer constamment sur les dernières nouveautés technologiques ou applications
  • Consulter les réseaux sociaux en conduisant
  • Utiliser son smartphone partout, y compris au lit et au bain.

Conséquences

L’internet est le vecteur de tous les usages excessifs des plaisirs qu’il permet. Il facilite donc l’addiction à toutes les activités les plus fondamentales pour l’être humain, et donc les plus « récompensantes » : la sexualité et les relations sociales. Il facilite donc les addictions sexuelles et les addictions aux réseaux sociaux et aux applications de rencontre. L’internet permet d’autres activités hautement « récompensantes » : il facilite alors les addictions aux jeux d’argent et aux jeux vidéo, ainsi que les achats pathologiques.

L’ évaluation de l’efficacité des méthodes non médicamenteuses face à la dépendance

Des scientifiques ont pensé en revue 26 études afin de déterminer l’efficacité de certaines solutions pour les problèmes de dépendance aux jeux vidéo et à internet (3).

Les différentes méthodes évaluées scientifiquement

Les auteurs de la revue mettent en garde sur les limites méthodologiques et le manque d’études s’intéressant à une solution spécifique pour pallier ce problème. Néanmoins, des études suggèrent que certaines solutions peuvent apporter une amélioration significative dans le traitement des addictions aux jeux et à internet.

Les thérapies cognitivo-comportementales ou TCC

Le principe

Selon la définition de l’AEMTC (l’Association pour l’Étude, la Modification et la Thérapie du Comportement), « les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) ont pour objectif de remplacer, de façon concrète, observable et durable, des réactions problématiques par des conduites souhaitées. Pour ce faire, elles se basent principalement sur des acquis de la psychologie scientifique ».

Le résultat des études

4 études ont évalué les effets de ces thérapies chez des adultes.
15 sessions de groupe et  8 sessions individuelles ont permis une amélioration significative des symptômes liés à la dépendance à Internet. La TCC a également permis de réduire le temps passé sur internet, y compris 6 mois après la fin des séances.

En pratique

De la famille des thérapies brèves, Les TCC sont pratiquées par des psychiatres et des psychologues formés spécifiquement. Mais certaines personnes n’ayant pas de formation sérieuse proposent également des séances en TCC. Il faut donc rester prudent dans le choix de son thérapeute. Une carte des thérapeutes est par exemple proposée par l’AFTCC (Association France de Thérapie Comportementale et Cognitive).

Le plus souvent, une vingtaine de séances est préconisée, avec une ou deux séances hebdomadaires. Chaque séance dure 45 minutes environ. Le traitement global s’envisage sur une courte durée : de trois à six mois, maximum.

La thérapie familiale

Le principe

La thérapie familiale est une « thérapie brève ». Elle s’adresse généralement aux familles dont un enfant présente un symptôme inquiétant (difficultés d’endormissement, cauchemars, troubles alimentaires, drogue…). Elle vise à mobiliser les ressources de la famille et à améliorer la communication entre ses membres en vue d’apaiser des symptômes et/ou des difficultés relationnelles. La famille peut être reçue par un ou deux praticiens.

Le résultat des études

59 adolescents ont bénéficié, dans une étude, d’une intervention à plusieurs niveaux dans le cadre d’une dépendance à internet. Cette intervention a fait appel à des entretiens motivationnels, l’élaboration d’un plan de carrière et une thérapie familiale.
Cette intervention a montré une réduction significative de la gravité de la dépendance après 15 à 19 mois de traitement. Le volet thérapie familiale était axé sur la résolution des conflits, l’amélioration de la communication intrafamiliale, le recadrage des symptômes de dépendance et l’accompagnement concernant des étapes du changement.

En pratique

Certaines situations nécessitent un accompagnement par des professionnels. Les thérapeutes habilités à animer des thérapies familiales sont des psychologues ou psychiatres qui ont suivi une formation complémentaire et spécialisée dans cette approche. Trois à cinq entretiens sont menés à raison environ de deux fois par mois avant une première évaluation des potentiels bénéfices. Plusieurs centres proposent ce genre de thérapie. Parmi eux, l’Association Monceau : www.centremonceau.fr, le Centre d’étude de la famille (Cefa) : www.cefa.asso.fr, l’Institut d’études de la famille : www.institutfamille.com, le Centre d’études cliniques des communications familiales (Ceccof) : www.ceccof.com, le Centre Pluralis : www.pluralis.org, la Société française de thérapie familiale psychanalytique : www.psychanalysefamille.org ou encore la Société de thérapie familiale psychanalytique d’Ile-de-France : www.psychanalysefamille-idf.net.

La thérapie journalistique ou journal thérapie

Le principe

Assez fréquemment utilisée dans le cadre de TCC, la thérapie journalistique également appelée thérapie d’écriture invite l’utilisateur à écrire dans un journal intime. L’objectif étant de soulager les tensions, prendre conscience des difficultés et trouver des solutions. La relecture permet alors d’identifier des pensées récurrentes et clarifier le problème en question. L’écriture en groupe ou avec l’aide d’un thérapeute peut faciliter une telle psychothérapie.

Le résultat des études

46 adolescents ont participé à une étude sur la thérapie journalistique. Outre l’utilisation d’un journal intime, les adolescents ont pu discuter de leurs problèmes liés à l’utilisation du smartphone avec leurs parents. Ils ont également été encouragés à modifier leurs comportements. Parallèlement, ils ont tenu un journal pour rendre compte de l’utilisation de leur smartphone (temps passé, contenu, lieu d’utilisation et auto-évaluations réfléchies). Résultat : leur dépendance à internet a significativement diminué au bout de deux semaines.

En pratique

Pendant les vacances, inscrire une fois par jour pendant 2 semaines :

  • une estimation quotidienne de la durée d’utilisation de son smartphone,
  • les applications de smartphone utilisées,
  • les situations pendant lesquelles le smartphone a été utilisé,
  • une auto-évaluation de l’intérêt de l’utilisation du smartphone.

Si besoin, se faire accompagner un professionnel formé à la TCC.

Les astuces de prévention

Nous ne sommes pas nécessairement conscients du cercle vicieux de la dépendance aux jeux vidéo et à internet. La prévention reste encore la meilleure attitude à adopter. Voici une liste non exhaustive d’actions facile à mettre en œuvre :

1. Bloquer les sites Web distrayants pendant un laps de temps défini
De nombreuses applications existent pour cela.

2. S’astreindre à une durée maximale d’utilisation par jour
Pour les réseaux sociaux, la lecture de mails personnels, le shopping.

3. Limiter le nombre de personnes que l’on suit sur les réseaux sociaux
Cela paraît étrange mais suivre des gens virtuellement, c’est chronophage et addictif !

4. Supprimer les icônes des réseaux sociaux sur les smartphones
Moins on les voit, moins on est tenté de cliquer dessus !

5. Résister à la tentation d’installer des jeux sur son téléphone
Préférer les divertissements qui impliquent des interactions et activités sociales en présentiel (passer un moment avec ses enfants, ses amis, cuisiner, faire de la musique, peindre, etc.).

6. Couper les notifications des applications
Moins on est sollicité, plus on est concentré ! Cela permet de limiter l’envie de cliquer immédiatement pour aller voir l’information proposée.

7. Essayer de mettre en place une « digital detox » régulièrement
Commencer par un jour dans la semaine sans utiliser d’écrans au profit d’une autre activité ancrée dans le « réel » : ballade en nature, repas avec la famille, les amis… Si l’expérience est concluante, on peut augmenter la durée de la detox et observer ses effets.

8. Prendre du recul sur l’utilisation d’internet
Déterminer ses besoins réels liés aux réseaux sociaux, aux jeux vidéo, en ligne, au shopping compulsif etc.)

9. En parler à un professionnel de la santé.
En cas de doute, de changement de comportement avéré, il est essentiel d’en parler à un professionnel qui saura vous orienter vers la thérapie la plus adaptée à votre situation.

En bref

L’addiction aux jeux vidéo et à internet peut être prise en charge grâce à plusieurs méthodes. Parmi elles, la thérapie familiale, la thérapie d’écriture ou encore les thérapies cognitivo-comportementales. Ces thérapies semblent donner de bons résultats pour réduire le temps passé à jouer et /ou surfer sur le web. Elles permettraient également de réduire la gravité de la dépendance dans certains cas. Les auteurs insistent néanmoins sur l’importance de mener d’autres études plus rigoureuses sur le plan méthodologique pour confirmer ces résultats. Enfin, la dépendance peut s’installer de manière insidieuse. Dans une démarche préventive, s’interroger sur sa consommation et son utilisation du web est essentiel. Et des astuces simples à mettre en place peuvent suffire à prévenir d’éventuelles dépendances.

Ressources bibliographiques


1. L’essentiel du jeu vidéo, SELL, février(2020), disponible ici

2. ADDICTIONS : LA RÉVOLUTION DE L’e-SANTÉ POUR LA PRÉVENTION, LE DIAGNOSTIC ET LA PRISE EN CHARGE, disponible ici

3.Kristyn Zajac, Meredith K. Ginley, Rocio Chang,and Nancy M. Petry (2017), Treatments for Internet Gaming Disorder and Internet Addiction: A Systematic Review, Pubmed.

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